Cette expression désigne l’arrêt de l’activité d’un boxeur. La cause de cet arrêt est multiple :
Atteinte de la limite d’âge (entre 32 et 35 ans),
Problème de santé,
Modification de la situation familiale, professionnelle ou personnelle,
Diminution de la motivation,
Augmentation des freins psychologiques,
Sanctions fédératives (retrait de la licence).
Parfois, certaines de ces causes ne provoquent qu’une interruption passagère de l’activité. Après un temps plus ou moins long, le pratiquant fait un « come-back ».
Qu’elle soit volontaire ou subie, la cessation de l’activité est le plus souvent vécue douloureusement par le boxeur. La douleur sera d’autant plus grande qu’il se sera beaucoup investi dans sa discipline. L’attachement à la boxe est proportionnel à sa dureté.
Souvent, l’individu s’est orienté vers la boxe parce qu’il ne trouvait pas dans la vie quotidienne le moyen d’exprimer et de vivre pleinement les valeurs auxquelles il était attaché (Voir Boxeur). Raccrocher les gants signifie donc rejoindre le monde des autres hommes, de ceux qui ne partagent pas ces valeurs, et s’inscrire dans un rapport social qui fonctionne sur d’autres principes (Voir aussi Ame des boxeurs).
Souvent, la boxe a été l’unique facteur d’éducation de l’individu. Elle est venue combler un vide social, familial ou culturel (dans le sens le plus large), ou même compenser un rejet. Elle a pu constituer une planche de salut qui a évité à l’individu de glisser sur une mauvaise pente ou de perdre totalement ses repères humains et sociaux. Elle s’est présentée sur le chemin au bon moment.
L’entraîneur a constitué un père de remplacement, mêlant l’autorité à une reconnaissance et à un encouragement des qualités propres de l’individu - qualités qui pouvaient ne pas être reconnues par l’entourage, et même qui pouvaient être dévalorisées, ignorées ou condamnées.
Les dirigeants de clubs, les arbitres, les juges, les responsables fédératifs, les médecins, ont constitué autant d’interlocuteurs de la société (représentants de l’autorité, de l’administration, de la santé, de la Loi) avec lesquels il a pu établir un dialogue, parfois vif, mais toujours dans le cadre d’une reconnaissance de son existence, de son fonctionnement et de son utilité.
La salle d’entraînement a été un lieu chaleureux, comme un ventre maternel, étouffant les bruits de l’extérieur, protégeant des attaques du monde environnant. Un lieu à la fois d’oubli et de retrouvailles. Un lieu à la fois dur et hors du temps.
Enfin, la boxe l’a construit physiquement et moralement ; elle l’a accompagné tout au long du passage de l’adolescence à l’âge adulte. Elle s’est inscrite profondément dans ses cellules, dans ses neurones, dans sa chair et dans son sang. Elle a été un appui, un guide, une sorte de « passeur », une source inépuisable de souffrances et de joies. Les multiples émotions qu’elle a suscitées ont gravé dans sa mémoire et même sur son corps, de profonds sillons que le temps ne pourra effacer.
Si la boxe a fait le boxeur, il y a fort à parier que le boxeur était déjà boxeur avant d’enfiler les gants pour la première fois. Cette communion totale entre l’individu et la discipline qu’il pratique explique la difficulté à raccrocher les gants. D’où de fréquents « come back » et des carrières qui n’en finissent pas, exposant l’individu à de graves dangers (Voir Lésions cérébrales). Pourquoi l’individu abandonnerait-il la partie alors que, durant toutes ses années de pratique, il a eu à cœur d’aller au bout de chaque combat ?
Plus ou moins consciemment, il peut être poussé à rechercher l’accident pour être contraint à une décision qu’il se sent incapable de prendre volontairement « à froid ».